Etude paléomagnétique de sols cuits et de verres silicatés en surface du désert d'Atacama (Chili).
Pierrick Roperch  1, 2@  , Nicolas Blanco  3@  , Millarca Valenzuela  4@  , Jean Pierre Lorand  5@  , Andrew Tomlinson  3@  , Cesar Arriagada  6@  , Jérôme Gattacceca  7@  
1 : Géosciences Rennes et Université du Chili  (GR)  -  Site web
Universite de Rennes 1, Observatoire des Sciences de l'Univers de Rennes, INSU, CNRS : UMR6118
Bâtiment 15 - Université de Rennes 1 - Campus de Beaulieu - CS 74205 - 35042 Rennes Cedex - France -  France
2 : Géosciences Rennes  (GR)  -  Site web
Universite de Rennes 1, Observatoire des Sciences de l'Univers de Rennes, INSU, CNRS : UMR6118
Bâtiment 15 - Université de Rennes 1 - Campus de Beaulieu - CS 74205 - 35042 Rennes Cedex - France -  France
3 : Sernageomin
Santiago -  Chili
4 : Universidad Catolica
Santiago -  Chili
5 : Laboratoire de Planétologie et Géodynamique de Nantes  (LPG)  -  Site web
CNRS : UMR6112, INSU, Université de Nantes
2 Rue de la Houssinière - BP 92208 44322 NANTES CEDEX 3 -  France
6 : Universidad de Chile [Santiago]  -  Site web
v. Libertador Bernardo O'Higgins 1058, Santiago -  Chili
7 : CEREGE CNRS/ Aix-Marseille Université
Centre de Recherche et d'Enseignement de Géosciences de l'Environnement [CEREGE]
BP 80, 13545 Aix en Provence, Cedex 4 -  France

Nous avons commencé l'étude d'un champ de verres silicatés et de terres cuites observés à la surface du désert d'Atacama dans le nord du Chili découvert en 2012 par des géologues du Service Géologique Chilien. Les datations C14 disponibles suggèrent une formation pendant l'époque du Dryas récent précédant la transition Pléistocène-Holocène.

Un échantillonnage paléomagnétique préliminaire a été réalisé avec des échantillons orientés in situ de terres cuites et des échantillons non-orientés de roches fondues.

L'intensité de l'aimantation rémanente naturelle (NRM) est variable dans les blocs de verres silicatés. Les aimantations les plus faibles se trouvent dans les verres les plus denses, tandis que les plus fortes intensités (> 1 Am-1) correspondent aux échantillons avec le plus bas degré de fusion ou les "terres cuites" (jusqu'à 6 Am-1). La variation de la susceptibilité magnétique en champ faible avec la température indiquent que la magnétite est le porteur magnétique principal même si plusieurs échantillons de roches fondues n'ont pas un point de Curie de magnétite bien défini. Des expériences d'hystérésis confirment la faible quantité de matière magnétique dans certains échantillons de verre avec des aimantations à saturation faibles. Plusieurs échantillons ont des rapports d'hystérésis indiquant des particules de magnétite monodomaine.

Une aimantation rémanente univectorielle a été déterminée dans tous les types d'échantillons après désaimantation thermiques ou par champs alternatifs. Dans les "terres cuites", l'aimantation est stable avec la même direction caractéristique enregistrée pour les sept blocs orientés. La direction caractéristique moyenne est : (Déclinaison: 351°, Inclinaison: -40° avec un angle de confiance à 95% de 2°). Les roches fondues au dessus des terres cuites ont aussi une aimantation rémanente stable semblable aux terres cuites sous-jacentes.

Ces propriétés magnétiques démontrent que l'aimantation est une aimantation thermorémanente acquise au cours du refroidissement. Cette interprétation est confirmée par la comparaison avec des aimantations thermorémanentes acquises au laboratoire dans un champ connu.

Les expériences de Thellier sur 11 échantillons de terres cuites donnent des déterminations de paléointensité très bien définies avec un paléochamp moyen de 39.4μT ±1.6. La très grande qualité des expériences de paléointensité démontre la nature thermorémanente de l'aimantation. La grande stabilité de l'aimantation, son intensité élevée (> 1 Am-1), le déblocage des températures inférieures à 580 °C, la présence d'une phase de haute coercivité typique souvent observée dans les études archéomagnétiques démontrent que les sédiments ont été chauffés au-dessus de 600 °C jusqu'à une profondeur de plus de 10 cm.

Alors que toutes les mesures magnétiques standard mettaient en évidence principalement de la magnétite dans les verres silicatés, les observations au microscope optique en lumière réfléchie ou au microscope électronique à balayage (MEB avec EDS) mettent en évidence des sulfures de fer avec une composition proche de la troïlite (FeS), localement partiellement à fortement oxydés ce qui est assez fréquent en climat désertique.

En section polie, ces particules se trouvent généralement près des vésicules. Certains grains contiennent également des phosphures métalliques parfois étroitement associés avec le sulfure de fer. Les analyses EDS indiquent une composition proche de la perryite pour le pôle nickélifère ou d'une phase inconnue Fe3P pour le pôle ferrofère.

Les travaux et résultats disponibles permettent de rejeter plusieurs hypothèses pour la formation des verres silicatés. Il ne s'agit pas de scories métallurgiques (composition des verres, âge, pas de site archéologique proche). Il n'y a pas d'activité volcanique à moins d'une centaine de kilomètre. Les sols cuits et les verres n'ont pas pu être formés par la foudre (fulgurites) car les surfaces sont importantes et d'autre part les propriétés magnétiques ne montrent pas l'enregistrement de champs magnétiques intenses comme ceux associés à la foudre. Enfin, il n'y a rien dans le sol et sous-sol proche de la surface permettant d'envisager un phénomène de pyro-métamorphisme.

Les terres cuites et la fusion des sédiments en surface impliquent un phénomène thermique in situ. L'absence d'un cratère d'impact d'une météorite permet de rejeter l'hypothèse d'éjectas. La destruction d'un astéroïde dans l'atmosphère est notre principale hypothèse de travail pour expliquer les effets thermiques au sol observés dans cette région du nord du Chili. 


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